Page:Leo - Aline-Ali.djvu/43

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rait retrouver les maîtresses, auxquelles, disait-il, les fantaisies maternelles de sa femme l’avaient renvoyé. Il avait repris son ancienne vie. Je l’ignorai d’abord ; puis mes soupçons furent excités ; je voulus savoir, j’eus des preuves et les lui montrai, le pensant remplir de confusion. Mais il ne fit que se moquer de mes reproches, disant qu’une femme d’esprit ne devait jamais s’apercevoir de semblables choses, ou n’en tenir compte que pour lutter de séductions avec ses rivales.

« M’ayant donné cette leçon avec une aisance parfaite et une dignité magistrale, il voulut bien prendre un ton plus doux, se déclarer flatté de ma jalousie, et me complimenter sur l’éclat de mon teint… Mais je le priai de retourner à ses maîtresses avec une telle sincérité de dégoût, qu’il me sentit invincible et, de ce moment, me prit en haine. Trop incapable de comprendre le respect de soi pour ne pas attribuer de secrets motifs à ma résistance, il me surveilla. Je me vis en butte aux plus vils soupçons.

« Que m’importait ? Je vivais de mon fils, je l’adorais, j’en faisais un Dieu, et je méprisais les hommes. Je me réfugiais en lui de toute souffrance ; il me rendait mes caresses et me saluait de cris de joie. J’étais alors tout pour lui, sa Providence ; il m’appartenait tout entier… Pour lui, je refis mon éducation ; j’étudiai, je comparai, je réfléchis beaucoup ; je voulais être son institutrice, en faire un homme nouveau, un homme pur et juste. Je caressai ce rêve que mon fils ne serait l’agent de la dégradation d’aucune femme, qu’il ne chercherait point ses joies dans l’injustice et resterait digne d’un grand amour. Ce rêve et la chère réalité du bel ange que