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Page:Leo - Attendre - Esperer.djvu/108

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ture qui était proche, Émile sauta dans le chemin, et Mme de Carzet regarda. Marthe, qui s’était ralliée près de sa mère, appelait Sapajou ; mais l’espiègle enfant parti d’un éclat de rire en voyant le chien tout emmêlé dans le peloton de Mlle Chaussat et qui usait de ses dents pour se débarrasser, au grand désespoir de la vieille fille.

Celle-ci eut bien voulu se charger elle-même de la besogne ; mais elle avait l’air si irritée que Sapajou, craignant des voies de fait, lui montrait les dents aussitôt qu’elle s’approchait, et recommençait, dès qu’elle s’était retirée, à ronger la laine.

— L’horrible bête ! l’odieuse bête criait Mlle Chaussat, que chaque coup de dent semblait atteindre. On devrait fusiller cela.

Car cette digne personne employait parfois, par habitude de voisinage, des expressions militaires.

— Mille pardons, mademoiselle, dit sèchement Émile, Sapajou est une bête bien élevée et qui ne pouvait s’attendre à trouver là votre peloton.

En même temps il acheva de briser la laine et de dégager le chien. Un peu déconcertée d’abord, Mlle Chaussat répondit aigrement :

— Et pourquoi donc, mon cher monsieur, mon peloton ne devait-il pas se trouver là ? Il me semble pourtant que les chemins sont pour tout le monde — excepté pour ceux qui ont des raisons de passer par des sentiers et de se cacher derrière les haies.

Cette dernière insinuation avait été dite à voix plus basse, comme si l’auteur même en avait eu honte, ou plutôt