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Page:Leo - Attendre - Esperer.djvu/19

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cate, fille évidemment d’un sang noble, mais appauvri.

« Madame, balbutia le jeune docteur ébloui, veuillez m’excuser…

— Pourquoi, monsieur, demanda-t-elle de ce timbre harmonieux qui avait déjà frappé l’oreille d’Émile sous les genêts.

— Des soins que je vous impose.

— Mais ils n’ont rien que de volontaire et de très naturel, dit-elle. J’ai été saisie d’une grande frayeur en rencontrant cette pauvre femme évanouie. Quel bonheur, monsieur, que vous vous soyez trouvé là !

En ce moment, la meunière, qui avait rouvert les yeux, essaya de parler ; mais le docteur lui imposa silence. Une femme du hameau voisin venait d’entrer. Il la pria de déshabiller la malade et sortit de la chaumière avec la belle inconnue.

— Si je vous ai bien compris, monsieur, dit celle-ci, vous n’attribuez la maladie de Jeanne qu’à l’épuisement des forces et au manque de soins. Cette famille cependant n’est pas dans la misère. Le mari serait-il donc un avare ?

— Non, madame, c’est tout bonnement un paysan, c’est-à-dire un de ces hommes dont la loi suprême est, je ne dirai pas l’épargne (car, tant par inertie que par ignorance, ils dilapident effroyablement), mais l’horreur de toute dépense qui n’a pas pour but un gain immédiat. Celui-ci est honnête, humain, autant qu’ils savent l’être, et s’afflige de la maladie de sa femme. Il irait même, pour la guérir, et la remettre en état de vaquer à ses travaux,