pas sans combats. Après l’invitation de Mme de Carzet, cette abstention était peu polie, et le docteur était trop bien élevé pour n’en pas beaucoup souffrir.
Un jour que, revenant d’une de ses courses, il traversait la petite ville, il vit, stationnant à la porte d’un des notables de l’endroit, une calèche tenue par un cocher en livrée. Aucun Savenaisien jusque-là n’ayant inauguré un tel luxe, Émile pensa que ce ne pouvaient être que le baron de Beaudroit et sa fille qui faisaient des visites. Mais, en ce cas, Mme Keraudet et son fils ne pouvaient manquer d’être sur la liste, et cette idée causa un grand trouble au jeune docteur. Sur l’information prise dans la rue, que l’événement agitait, ses prévisions furent confirmées et il rentra chez lui fort ému. Sans doute il aurait pu ne pas rentrer ; mais il se dit qu’il devait prévenir sa mère, précaution exagérée, car Mme Keraudet était la ménagère la plus irréprochable sous le rapport de la tenue, et, sauf la différence de la laine noire à la soie de même couleur, sa mise était la même en tout temps. Elle se borna donc à essuyer plus soigneusement le verre de ses lunettes et à remplacer des manchettes fort propres par des manchettes éblouissantes de blancheur. Mais en revanche, elle critiqua vivement la toilette de son fils et lui ordonna de se faire beau.
— C’est inutile, dit Émile, je te laisse le soin de recevoir ces aristocratiques visiteurs, et je fais atteler pour m’en aller à Couëron.
— Tu ne parles pas sérieusement, s’écria la bonne dame, qui ne croyait