Page:Leo - Grazia.djvu/165

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tous les uns après les autres, en disant cela. — Nous savons combien l’on peut compter sur vous, reprit-il en s’adressant particulièrement au clan Puxeddu. Mais peut-être y a-t-il un autre moyen, que nous n’avons pas trouvé jusqu’à présent. En tout cas, nous nous reverrons bientôt.

— C’est bon ! dit Puxeddu, en se levant d’un air dédaigneux.

Et beaucoup suivaient son exemple, quand de Ribas, allant ouvrir la porte, cria :

— Grazia, quatre bouteilles de Vernaccia[1].

Elle vint, les joues animées d’une rougeur légère et les yeux baissés, et je me dis en la regardant, qu’elle seule n’avait point été convoquée au conseil, elle, la plus intéressée.

— À présent, laisse-nous tout de suite, lui dit brutalement son père, en la voyant s’occuper d’emporter quelques plats.

On but, on trinqua à la santé d’Antioco, et bientôt nous partîmes. Le vieux Basilio restait en conversation avec son riche parent, ami des idées nouvelles et de la justice des tribunaux, et lui disait :

— Les juges !… Eh, je ne suis pas contre eux, moi ! Je dis seulement qu’ils ne font pas tout le bien qu’ils devraient faire, parce qu’ils ont des idées à eux, qu’on ne peut pas leur ôter de la tête. Ainsi, quand je leur dis, moi, Basilio Tolugheddu, un homme connu et considéré, que mon fils est menacé par ce vaurien, et qu’il faut le mettre en prison, croyez-vous qu’ils me répondent : — Il faut des preuves. — Des preuves ! des preuves ! nous verrons… Mais ce n’est pas ça aider comme il faut les pères de famille et les gens de bien. On devrait faire les choses plus simplement, à mon gré.

— Mais, cousin, répondait le civilisé…

Et je n’en entendis pas davantage.

  1. On appelle vernaccia en Sardaigne un vin blanc mousseux.