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Page:Leo - Grazia.djvu/81

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lui exprimer, s’il était possible, combien il l’aimait lui était reconnaissant !… Comme elle l’avait bien compris !… comme elle avait deviné !… Elle seule, oui ! elle seule, pouvait ainsi, sans explication, tout dire :

— Antioco Tolugheddu va me demander en mariage, et mon père consentira.

Ce qui revenait à ceci :

— Effisio, je sais que vous m’aimez, et moi aussi, je vous aime ! Hâtez-vous d’agir, car nous sommes menacés d’un grand malheur ! Chère courageuse ! Avec son air si doux si timide, auriez-vous cru cela ?

Il riait et ses yeux débordaient de larmes.

À la troisième reprise de la danse, il conquit de nouveau la main de Grazia. Ils se parlèrent peu, mais leur visage rayonnait d’un bonheur intense. Le plaisir de s’aimer et de s’entendre leur faisait oublier le danger qui les menaçait.

En rentrant, Effisio fit seller son cheval, et, prenant à peine le temps de manger quelques bouchées, jetant son fusil sur son épaule :

— À demain matin ! s’écria-t-il en prenant le galop.

J’allai me coucher, inquiet de l’issue de cette affaire, et attendant son retour avec impatience.

Après un sommeil agité, je m’éveillai à la pointe de l’aube et me mis à la fenêtre. Les montagnes étaient noyées dans la brume, le village dormait, et j’allais me recoucher, quand un bruit léger, comme le pas régulier d’un cheval, frappa mon oreille. Effisio déjà peut-être ? Le bruit n’était pas lointain, comme je l’avais cru d’abord, et bientôt je vis passer un cheval, conduit par un homme qu’à l’élégance et à la hauteur de sa taille, je crus reconnaitre pour Pietro de Murgia. Chose étonnante ! l’homme et le cheval glissaient comme deux fantômes, presque sans bruit, et je n’entendais ni le choc des fers, ni celui de semelles ferrées sur l’âpre pavé de la rue. L’homme était pieds nus, sans doute ; mais le cheval !