Page:Leo - L Institutrice.djvu/156

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des récréations pendant plusieurs jours. N’était-ce pas une mesure inhumaine et fausse, puisqu’elle n’avait d’autre but que de frapper ?

Dans l’état de barbarie où nous sommes encore, les mœurs sociales sont des mœurs de guerre, tout se passe d’adversaire à adversaire et de vainqueur à vaincu. En éducation comme dans l’ordre juridique, le coupable est ennemi, le mal venge le mal ; la vie est une bataille.

La souffrance qu’éprouveraient Marie et ses compagnes d’une longue privation d’air et d’exercice aurait-elle pour effet de modifier leurs sentiments à l’égard de l’institutrice ? — Elles n’en pourraient éprouver que plus d’animosité ou plus de crainte, deux sentiments également dépourvus de moralité, par conséquent inféconds pour le bien, et seulement propres à produire des actions viles ou méchantes. — Cette méthode-là était donc fausse, et Sidonie, le reconnaissant, ne pouvait plus l’employer sans être coupable, sans se rendre indigne des fonctions qu’elle remplissait.

Toute la nuit, elle chercha comment elle pourrait s’y prendre pour opérer, sans trop d’éclat, sa conversion de système. Un moment, elle se crut bien habile en songeant à s’abriter derrière l’Évangile ; mais le pardon des injures dans l’Évangile va jusqu’à tendre la joue à l’outrage, et ce n’était point là ce que Sidonie voulait enseigner. Elle trouva dans l’histoire des vertus humaines de plus purs exemples.

(À suivre)

ANDRÉ LÉO