Page:Leo - L Institutrice.djvu/158

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— Ils en auraient eu le droit, répondit alors une des grandes.

— Qu’en serait-il résulté ? Ces hommes seraient-ils devenus meilleurs ? S’ils avaient été mis en prison ou privés de leurs biens ?

— Ils auraient détesté le duc.

— Et ne pensez-vous pas qu’après sa généreuse action, ils l’auront aimé peut-être ?

— Oh ! oui, sûrement.

— Du moins nous devons le croire. Eh bien, il vaut mieux être aimé que haï. Les choses vont beaucoup mieux dans le bon accord que dans la colère. Ainsi, vous avez mal agi hier envers moi, et je vous ai fortement punies. Vous auriez certainement beaucoup d’ennui d’être privées de récréation pendant plusieurs jours, et, si j’étais disposée à prendre avantage de votre peine, je maintiendrais cette punition ; mais je ne crois pas que cela puisse avoir pour effet de vous rendre bonnes, ni de vous attacher davantage à vos devoirs. Tandis que, si je suis bonne pour vous, peut-être aurez-vous envie de l’être aussi ? Vous pouvez donc aller jouer comme à l’ordinaire, et quant aux petites, qui ont été punies dès hier, elles auront aujourd’hui une demi-heure de récréation de plus.

Les petites se levèrent avec enthousiasme et les grandes restèrent étonnées d’abord et assez confuses ; puis les unes murmuraient un remercîment, d’autres se mirent à pleurer, et quelques-unes vinrent embrasser Sidonie. La récréation fut moins bruyante qu’à l’ordinaire ; il se forma des groupes où l’on causa de l’événement et les enfants rentrèrent dans la classe d’un air doux et sage, qu’elles n’avaient pas eu depuis longtemps.