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Page:Leo - L Institutrice.djvu/176

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— Sans doute, balbutia Sidonie.

Mme Maigret se répandit alors en détails sur M. Lucas, sur son mobilier, sur sa défunte femme, sur ses filles, dont l’une avait les cheveux rouges, et une foule d’autres particularités. Puis, elle laissa Sidonie à ses réflexions.

Il n’était pas difficile de comprendre, et Sidonie avait compris. Ce qu’elle éprouvait était de la surprise, du saisissement, et une immense amertume. Se marier ! elle ! C’était la première fois qu’une offre de ce genre prenait place dans sa vie et elle était bien aise que cela arrivât enfin ; mais épouser cet homme-là ! Était-ce possible ? Oh non ! non ! — Pourtant, se disait-elle, il y aura donc au moins un homme qui aura songé à moi pour épouse ! — Mais en même temps, elle se sentait blessée que ce ne fût que celui-là. — Sans doute, pensait-elle naïvement, c’est un homme instruit, respectable, mais… elle n’aurait trop su définir ce qu’elle avait à lui reprocher, et pourtant il lui déplaisait. Trop peu expérimentée pour analyser à première vue les défauts d’un homme, — et surtout d’un homme revêtu d’une couche d’importance aussi accusée, — son instinct, délicat au fond, n’en était pas moins averti de la vulgarité réelle du personnage. Cet instinct seul, en faisait la critique ; mais il la faisait sans pitié, et plus elle le considérait de souvenir, moins elle se sentait attirée.

Tout à coup, s’interrompant au milieu de cet examen :

— Et moi, se dit-elle : et moi, que suis-je maintenant ? Il me sied bien d’être difficile !