Page:Leo - L Institutrice.djvu/54

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était beau, loyal ; elle en était sûre. Les coquetteries de Léontine l’agaçaient ; elle les lui pardonnait, cependant, parce que c’était grâce à cette coquette humeur de Mlle Favrart que leurs entrevues avec Ernest étaient plus fréquentes. Du reste, il était aisé de voir que le jeune homme, de son côté, s’y prêtait de tout son vouloir. Mais laquelle des deux l’attirait le plus ? On n’eût su le dire, et pourtant bientôt Sidonie crut le savoir. Inégal, impoli parfois vis-à-vis de Mlle Favart, il était toujours doux et respectueux pour l’institutrice, et dans cette douceur, elle devina ou crut deviner de la tendresse. Un seul mot d’ailleurs, une attention la touchaient jusqu’au fond de l’âme. Quand ils n’étaient que tous trois, cependant, il semblait surtout occupé de Léontine ; mais ne l’y forçait-elle pas par sa personnalité violente qui l’accaparait malgré lui ? En dépit de cette explication, Sidonie remportait toujours de ces entrevues une impression douloureuse, amère. Il en était autrement de leurs rencontres en public. Alors, Léontine se montrait plus réservée, et les attentions d’Ernest étaient manifestement pour Sidonie. Ces alternatives étonnaient la pauvre enfant et l’agitaient. Le doute, le chagrin, la joie, d’éternelles suppositions occupèrent sa pensée. Cependant, au-dessus de tout, sa jeunesse mettait l’espoir. Maintenant elle ne sentait plus ce vide, cette inquiétude qui l’avaient tourmentée. Son cœur était plein ; elle vivait !

ANDRE LÉO

(À suivre)