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Page:Leo - Les Deux Filles de monsieur Plichon.djvu/227

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geot. Blanche était fort gaie. Cette réception, ce grand dîner, tout cela l’enchante. C’est bien plutôt l’effet d’un goût naturel que l’effet de sa jeunesse. Je me rappelle, enfant, combien je préférais aux journées de réception, même pleines de gâteaux, ces douces journées intimes passées prés de ma mère.

J’ai cru devoir dire à M. Forgeot que j’avais été attaqué dans le bois la veille et qu’on m’avait pris pour lui. Je ne savais guère lui faire une impression aussi vive ; il est devenu fort pâle. Au fait, cet homme-là doit être poltron, et tenir, comme on dit, à sa peau. La nuit venue, M. Plichon, qui craint les rhumatismes, est retourné à la maison avec les dames, et nous sommes restés, le Forgeot et moi, chargés de prendre, à la faveur de la nuit, un nouveau cent d’écrevisses. Il regardait de tous côtés, soupçonnant un brigand derrière chaque touffe d’arbres, et, c’est moi qui ai dû lever les filets dans les endroits sombres. Il prit enfin le parti d’avouer sa peur avec cynisme et s’efforça de la justifier par des arguments. C’est toujours le procédé de ces natures sans élévation et sans idéal. Elles concluent de ce qui est à ce qui doit être, au lieu d’en appeler à ce qui doit être de ce qui est.

Nous remontions au plateau par un chemin bordé de haies épaisses, et il se serrait contre moi, plaisantant lui-même de sa peur le plus agréablement qu’il le pouvait faire, afin de combattre le dégoût qu’il sentait bien m’inspirer, quand nous entendîmes courir quelqu’un derrière nous. Je vis, à la clarté des étoiles, les genoux de mon homme se dérober sous lui :