Page:Leo - Marie - la Lorraine.djvu/32

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

et la voyant courut à elle. Elle le serra contre elle et l’embrassa, et se trouva moins honteuse. La langue du petit Pierre qui se mit à jaser dénoua aussi les leurs. Toutefois, s’ils parlèrent, ce ne fut pas pour dire ce qu’ils pensaient le plus, mais toutes sortes d’autres choses auxquelles ils ne tenaient guère. Les amoureux sont ainsi ; tant qu’ils n’ont pas dit le grand mot, plus timides que des petites filles ; puis, une fois dit, bavards comme des pies et ne faisant plus que le répéter.

À la fin, Louis faisant grand effort se prit à dire :

— Que pensez-vous de Bruckner, mam’zelle Marie ?

— Moi ! dit-il, d’un petit air dégagé ; il aurait mieux fait de rester dans son Allemagne, puisque c’est tant mieux qu’ici.

— Ah ! dit-il avec un grand contentement, et… et Marcelin Varuaud ?

— Celui-là… dit-elle, et rougissant, elle poussa un grand soupir.

Le cœur de Louis se mit à battre bien fort. — Bon Dieu ! Est-ce qu’elle aimerait ce Varnaud ?…

— Celui-là, reprit Marie, il me fait peur, et je le déteste parce que mon père s’en est coiffé. Mais jamais…

— Ah ! Marie ! s’écria Louis, si content, si aise, qu’il ne pensa plus à rien autre chose qu’à son amour, et jeta vivement le bras autour d’elle pour l’embrasser, sans voir qu’il venait quelqu’un dans le chemin, et, bien pis, que le père Chazelles, juste à ce moment-là, sortait de la maison. Marie, non plus, ne vit rien, hors son amoureux, et se laissa fort bien embrasser, la chose ne lui faisant point de peine. Ils avaient oublié jusqu’au petit Pierre, qui était à côté d’eux, mais qui, le cher innocent, n’y trouva rien à redire.

Il n’en fut pas de même du père Chazelles. Bien qu’après tout, ce ne soit pas chose qui tire à conséquence, à la campagne, qu’un baiser entre jeunes gens, l’aversion qu’il avait contre Louis Brésy