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Page:Leo - Marie - la Lorraine.djvu/65

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dressait, et, s’appuyant sur sa faux, reposait sur eux son regard. Lui, bien qu’ayant cinquante ans passés, il n’en restait pas moins à la tête, le vieux, toujours au bout le premier, et traçant l’andain le plus net et le plus fourni.

Ce jour-là donc, après avoir travaillé depuis l’aube, ils avaient coupé la moitié du champ ; mais ce n’était pas le dixième de la besogne, il en restait long et large, sans compter l’engrangement et le battage. Le soleil baissait. Il devait être au moins quatre heures. Les moissonneurs s’arrêtèrent une fois de plus au bout de la rangée, et regardèrent tous ensemble du côté de la ferme.

— Qu’a donc la mère aujourd’hui, dit maitre Chazelles d’un ton grondeur ? La collation devrait être ici depuis une demi-heure, Sacr…

— C’est pourtant pas la soif qui manque, dit François.

Et tous s’essuyaient le front.

— Ça fait chaud, juste comme au Mexique, où je ne suis pas allé, s’écria Jacques, surtout qu’il était de son devoir de servir quelque distraction en guise de rafraîchissement. Oui, ma foi, je n’ai pas voulu ; car on nous a demandé notre avis, vous savez ? Il y en a qui sont partis, comme ils disaient, pour la gloire. Quelle gloire ? Moi, que je me suis dit : Qu’est-ce que c’est que ça ? Aller tuer des gens qui ne vous font rien et qui sont au bout du monde ! J’en vois pas l’utilité. Ensuite, qu’est-ce que j’aurais eu pour la peine ? Les galons de caporal ou de sergent, et je serais revenu noir comme un Bédouin, ou, plus immanquablement, je ne serais pas revenu du tout. Merci !…

— Tout de même, c’est drôle, un sol-