Page:Leo - Marie - la Lorraine.djvu/87

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jourd’hui, comme font tous les rois et empereurs, Napoléon avait peur des hommes libres, et il refusa d’armer les habitants.

Aujourd’hui encore, sans doute, nous serons peu nombreux. Beaucoup de gens, qui sous les ordres de l’autorité auraient fait bravement leur devoir, se laisseront aller aux conseils de lâcheté qu’on leur donne, et ne nous suivront pas. Nous serons peu nombreux ; mais nous ferons notre devoir, et peut être aussi qu’en nous voyant agir, le bon exemple fera son effet. Nous avons des armes. Plusieurs des nôtres en avaient déjà. Beaucoup en ont ramassé, hélas ! sur les chemins, à la suite de l’armée. Enfin… nous en prendrons. Maintenant, voulez-vous être des nôtres ?

— Je ne puis pas laisser la maison et les femmes seules, répondit maître Chazelles, sans quoi j’irais avec vous ; mais les enfants feront ce qu’ils voudront.

— J’en suis ! dit François en se levant.

— Et moi aussi, dit Jérôme…

Mais un gémissement de sa mère l’arrêta.

— Non, pas tous deux, cria-t-elle. Au moins qu’un de vous reste !

Et elle ajouta pour les mieux persuader :

— Si les Prussiens viennent ici, votre père tout seul ne pourra nous détendre.

Jérôme hésita, puis dit en se rasseyant :

— Eh bien ! mère, je resterai.

Elle fut contente un moment ; puis se remit à pleurer à cause de François.

Debout, dans un coin de la chambre, où la clarté de la petite lampe ne pénétrait pas, Marie regardait et écoutait Louis de tous ses yeux et de toute son âme. Oh ! comme elle le trouvait brave et beau ! Le cœur lui sautait dans la poitrine ; elle aurait voulu pouvoir partir avec lui ; car elle sentait aussi qu’il est beau et grand de défendre son pays ; et, cependant, l’idée qu’il allait exposer sa vie lui arrachait le cœur. En quoi ! elle ne pourrait pas mère lui dire un mot, lui serrer la main auparavant ! Non !