Page:Leo - Soeur Sainte-Rose.djvu/7

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malheureux. Cependant, le petit la regardait effaré, comme s’il avait peur d’elle. Peut-être était-ce le costume de la religieuse qui lui causait cet effroi ?

Sœur Sainte-Rose alla s’asseoir au coin de la cheminée et pria la sœur cuisinière de lui donner un peu de potage pour les enfants. Une belle assiettée fumante et la chaleur du foyer calmèrent tout de suite la petite, et, bientôt après avoir mangé, sa tête ronde, coiffée d’un bonnet noir, d’où s’échappaient en frisant des cheveux blonds, se pencha de côté et d’autre et finit par s’appuyer sur les genoux de la sœur, où elle demeura profondément endormie. Mais quant au poupon, il détournait sa bouche de la cuiller, et se rejetant en arrière, comme il eut cherché le sein maternel, il poussait des cris perçants.

— Hélas ! dit sœur Sainte-Rose, c’est du lait qu’il faudrait à cet innocent. N’y aurait-il pas moyen, ms sœur, de lui en donner ?

— À cette heure ! il n’y en a plus, répondit la cuisinière, une religieuse vieille et un peu sourde, qui, après avoir dit cela, continua de vaquer à ses affaires, comme si la chose ne lui eut rien fait.

L’enfant souffrait pourtant. Et sœur Sainte-Rose aussi. Car il était bien cruel d’entendre crier cet enfant, de savoir ce qu’il demandait et de ne pouvoir le lui donner. Il souffrait : ses petites joues flétries avaient des tons jaunes ; sa petite bouche en s’ouvrant laissait voir le dedans des lèvres et la langue teintes d’un rouge vif, et ses cris, grêles et en-