Page:Leo - Un mariage scandaleux.djvu/131

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— Votre ancien maître ?

— Oui, mam’zelle.

Alors, poussée par une vive curiosité, Lucie reprit étourdiment :

— Voyons, Michel, dites-moi cela à moi : est-ce vrai que vous avez refusé d’épouser la fille à Martin ?

— Vous n’auriez pas dû me demander ça, répondit Michel d’une voix empreinte de douceur et de sévérité en lançant à Lucie un regard de reproche.

Sous ce regard elle baissa le sien et se sentit émue :

— Vous avez raison, dit-elle ; et elle ajouta en tendant la main à Michel : J’ai eu tort, et vous êtes un bien honnête garçon, Michel.

Il prit la main de Mlle Bertin, la serra vivement, et se leva.

— Attendez un moment, dit-elle, je vais vous donner des livres.

Il s’assit, elle passa dans la chambre voisine, et revint avec deux volumes, la Maison Rustique et Lucie de Lammermoor. Elle les avait pris pour elle-même le mois dernier dans la bibliothèque de l’oncle Grimaud, et elle les prêtait à Michel avant de les rendre. Comme elle posait ces livres sur la table, Michel se penchant vers elle dit avec chaleur :

— Mam’zelle Lucie, excepté les secrets des autres, tous les miens sont à vous, au moins ; le croyez-vous ?

— Tous ? répéta-t-elle en souriant.

— Vous ne le croyez point ? s’écria-t-il. Ah ! demandez-moi…

— Diable de Michel, va ! grommela M. Bertin au fond de l’alcôve ; ne pourrais-tu pas parler moins haut ?

Et se retournant bruyamment dans son lit, tout de suite il se reprit à ronfler.

Lucie en souriant avait mis son doigt sur ses lèvres.