Page:Leo - Un mariage scandaleux.djvu/290

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les hommes sont méchants ! s’écrie-t-elle en se remettant à pleurer.

— Console-toi, ma pauvre fille. Tout cela n’a pas le sens commun, et par conséquent tombera bientôt. La vérité sortira des nuages, et les ennemis seront confondus. On dira tout simplement à Michel que tu ne peux plus lui donner de leçons, que cela te fatigue… car il ne faut pas, bien entendu, qu’il puisse soupçonner…

— Cela le rendrait trop fier ! ajoute aigrement Clarisse.

— Maman, il faisait tant de progrès ! reprend Lucie d’un ton suppliant. Parce qu’il y a des méchants, faut-il n’être pas bon ?

— Ta réputation avant tout, ma fille ! La réputation est ce qu’une femme a de plus précieux !

— Mais tout cela n’est qu’une folie de Mlle Boc. Maman, je te le répète, qui peut incriminer des leçons données ici, dans notre maison, sous vos yeux ?

— Le monde, à présent, ma fille, est plein de mauvaises idées. De mon temps, on faisait tout ce qu’on voulait. Nous allions nous promener avec des jeunes gens, sans que personne y trouvât à redire. On s’embrassait même très-innocemment. Ton père m’a fait la cour pendant trois ans, et nous étions presque toujours seuls. Il n’y a jamais eu, cependant, le moindre mot sur mon compte. Mais la société se corrompt d’une manière effrayante !… Enfin, ma pauvre Lucie, tu dois renoncer à ta bonne action. Je ne vois pas d’ailleurs quel besoin a Michel d’être savant. Cela même pourrait lui nuire en lui donnant des idées au-dessus de sa condition. Ah ! voici ton père ! il ne faut pas lui parler de cela. Tu le connais, il jetterait feu et flamme ! Va-t’en bien vite ! Tu as la figure toute renversée, ma pauvre enfant !

Lucie alla pleurer au jardin. Couché sur l’herbe, de l’autre côté de la haie, Michel repassait la leçon inter-