Page:Leo - Un mariage scandaleux.djvu/64

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jaune, avec gants blancs et casquette galonnée. Mme  Bertin jetait un regard moqueur à son amie, quand elle s’aperçut que le visage de Gène était couvert de rougeur.

— Eh bien ! qu’y a-t-il ? demanda-t-elle, quand les deux jeunes gens eurent passé.

— Moi ? dit Gène en rougissant un peu plus, je ris comme vous de ce pauvre Isidore qui est d’un si sot orgueil. Depuis qu’il est chez M. de Parmaillan, il n’a pas eu de repos qu’il n’ait échangé la place de jardinier contre celle de laquais, et le voilà qui se promène à présent dans tout Chavagny, fier comme un dindon sous sa livrée.

— Mais, s’écria Lucie, c’est donc son frère, c’est Michel qui est avec lui ?

— Quoi ! vous ne le reconnaissiez pas, mam’zelle Lucie ?

— Je me demandais quel était ce beau garçon, et je le reconnaissais sans pouvoir le nommer. Comme il a changé ! comme il a grandi !

— C’est-il possible que vous ne l’ayez pas vu depuis si longtemps, mam’zelle Lucie ? À la vérité, il vient de passer trois ans à Château-Bernier.

— Non ; je ne le voyais pas. Je crois qu’il venait rarement chez sa mère, peut-être à Pâques ou à Noël seulement. Puis, tu sais, du moment où nous n’avons plus été camarades, quand maman a prétendu que j’étais trop grande pour continuer de jouer avec eux, et depuis que tu es allée, toi, demeurer aux Tubleries, je n’ai plus reçu Michel que de temps en temps. Pourtant nous nous sommes rencontrés hier, mais je ne l’ai pas vu, parce qu’il faisait nuit, et il m’a témoigné beaucoup de souvenir et d’amitié ; moi, le croirais-tu ? je l’ai reconnu tout de suite à la voix.

— C’est vrai que sa voix n’a pas changé, ni son cœur non plus, mam’zelle Lucie, car il est toujours brave et