Aller au contenu

Page:Leo - Un mariage scandaleux.djvu/63

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Au moins n’a-t-elle pas à se plaindre, répondit Mme Bertin, que les avantages extérieurs captivaient tout aussitôt.

— Après tout, ce n’est qu’un bruit, objecta Clarisse.

— Oh ! c’est bien sûr, mam’zelle, du moment que Mme Bourdon le reçoit dans son banc devant tout le monde.

— Clarisse est fatiguée de rester debout, dit la mère, allons tout de suite chez Mme Bourdon.

— Pour moi, dit Lucie, j’emmène Gène à la maison.

— Non, mam’zelle Lucie, une autre fois ; ma mère est trop malade aujourd’hui. Je vous accompagnerai seulement jusqu’au logis.

Gène et Lucie, se donnant le bras, se mirent à marcher, en causant intimement à demi-voix. Mme Bertin les suivait avec Clarisse, qui tremblait de fièvre sous son manteau, mais qui pour rien au monde n’eût manqué chez sa tante au dîner du dimanche. Cette pauvre fille avait le goût du monde et la passion du luxe. Tout ce qu’elle voyait chez sa tante l’émerveillait ; tout ce qui faisait partie de ce sanctuaire était respectable, beau et bon à ses yeux, et elle copiait de son mieux les manières de Mme Bourdon. Peut-être avait-elle provoqué la maladie de poitrine dont elle se mourait en se serrant dans son corset outre mesure, parce qu’elle avait la taille épaisse.

Gène et Lucie atteignaient l’avenue de marronniers qui mène au logis, quand deux jeunes hommes passèrent près d’elles en les saluant. L’un d’eux, grand et bien fait, qui portait la blouse bleue et le chapeau de paille, costume ordinaire des paysans, avait une figure remarquable, non tant par la beauté de ses traits, un peu forts, que par une expression frappante d’intelligence, de noblesse et de vivacité. L’autre, assez vulgaire, avait un costume rare dans ces campagnes. C’était une livrée bleue bordée de