Page:Leo - Un mariage scandaleux.djvu/66

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résédas et de verveines ; toutes ces plantes avaient été sorties des serres depuis quelques jours, et le soir, dans la crainte des gelées tardives, on jetait sur elles une vaste tente. À gauche, à travers les vitres d’une grande orangerie, éclataient des fruits d’or. À droite s’étendaient les serres, constamment et fortement chauffées, où croissaient en pleine terre, à côté des plantes exotiques les plus rares, une treille, des pêchers et des poiriers qui nouaient déjà leurs fruits. C’était un autre sujet d’émerveillement à Chavagny que ces belles serres, et plus d’un vieillard, l’hiver, de ces vieillards qui vont fagoter misérablement dans les bois, disait en remuant le soir des cendres éteintes dans sa demeure où soufflait le vent : — Si je pouvais tant seulement me blottir cette nuit dans la serre à M. Bourdon !

Ce n’était jamais sans émotion que Mmes Bertin pénétraient dans les confortables appartements du logis, si spacieux, si éclairés, d’un luxe, pour elles, si splendide, et tout imprégnés pour leurs sens non blasés des parfums d’une vie supérieure. Lucie était la seule dont la simplicité combattît ces impressions. Ce jour-là, ces dames étaient doublement émues par la pensée qu’elles allaient se trouver en présence de M. Gavel, et Mme Bertin eut besoin de rappeler tout son courage quand la femme de chambre, ouvrant la porte du petit salon, s’effaça pour la laisser entrer.

Ce petit salon tendu de perse verte avait des rideaux de mousseline blanche ; une glace et des bronzes ornaient la cheminée, des tableaux richement encadrés représentaient des sujets religieux. Le meuble était de palissandre.

Le premier regard des visiteuses rencontra M. Gavel assis entre Aurélie et sa mère près de la cheminée.

Il se leva aussitôt, et elles s’avancèrent éperdues, les