Aller au contenu

Page:Leo - Un mariage scandaleux.djvu/67

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

filles saluant de tous côtés pendant que Mme Bertin faisait en arrière des révérences de cour. Le froid baiser d’Aurélie, qui vint à leur rencontre avec un empressement glacial, masqua un peu le trouble de leur contenance, et cependant l’ingénieur se pinça les lèvres pour ne pas rire.

On recevait souvent chez Mme Bourdon haute et noble compagnie ; mais la famille Bertin n’était jamais invitée que le dimanche.

— Arrivez donc, mes chères ? dit Mme Bourdon en se levant à demi du fauteuil où elle était assise, et où bientôt, avec une grâce moelleuse, elle se replongea. Vous étiez bien dévotes aujourd’hui ! Quant à moi, l’éloquence de notre curé m’avait tellement assoupie que je me suis hâtée d’aller me réveiller au grand air.

— Hum ! certainement ! oui ! répondit Mme Bertin en grimaçant des sourires ; et, s’étant emparée du fauteuil que lui offrait Aurélie, elle s’y établit, roide, les pieds tendus, les mains croisées sur ses genoux, un sourire collé sur le visage, et répondant par monosyllabes, comme une pensionnaire de quinze ans.

Pendant ce temps, Clarisse demandait tout bas à Aurélie des nouvelles de sa santé.

Le ridicule de cette situation fit monter la rougeur de l’impatience au visage de Lucie. Elle surmonta tout à coup sa timidité, leva résolument les yeux sur M. Gavel, et se mêla à la conversation avec un mélange de vivacité et de réserve. Plusieurs fois, elle rencontra le regard de M. Gavel attaché sur elle. Ce regard à la fois perçant et doux la toucha.

— Bientôt il sera notre parent, se dit-elle, notre ami peut-être.

Le peu de toilette qu’avait Lucie lui seyait bien et la rendait élégante. Elle était fort gracieusement coiffée de