Page:Leo - Une vieille fille.pdf/143

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— Marie était femme, et ne l’était pas moins pour avoir en quelque sorte cessé de l’être pendant quelque temps. Elle céda ce soir-là aux influences qui la sollicitaient de goûter, elle aussi, ne fût-ce qu’une heure, son triomphe. Elle fut vive, gaie, spirituelle, et laissa éclater sur son visage tous les feux de son âme et de son esprit. Son instinct lui révélait tout à coup les finesses de la coquetterie, et, à ce jeu-là, quand elle veut le jouer, une femme sérieuse peut dépasser une coquette de profession. En contemplant cette femme nouvelle qui se dévoilait à lui, en admirant son fin sourire, ses yeux brillants, ses gestes gracieux, et en se répétant que c’était bien elle, son amie, celle qu’il aimait tant déjà, Albert se croyait l’objet d’un miracle et il avait peine à contenir ses transports. Elle vit ce qui se passait en lui et jouit un moment d’un bonheur immense : mais tout à coup elle se fit horreur. Se levant brusquement, elle prétexta une indisposition subite et congédia Albert. Toute la nuit elle