Page:Leon Silbermann - Souvenirs de campagne, 1910.djvu/108

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officiers, et chacun me remercia. Puis, je partageai le reste avec plusieurs marins. Il faut bien se rendre service en campagne.

Mais la pitance étant maigre, je me mis à la recherche de quelques volailles, en compagnie de deux marins ; deux heures après mon estomac était tranquille, car je l'avais lesté du quart d'une dinde et d'un poulet, le tout arrosé largement de l'eau du fleuve.

On m'a dit que cet engagement nous coûtait un mort et quatre blessés. Un petit incident m'était encore arrivé dans cette journée. J'avais été envoyé par le commandant Bienaimé avec un marin, en arrière, du côté du fleuve, pour dire au colonel de Beylié de faire avancer les canonnières jusqu'à Marovoay. Nous traversâmes un ruisseau pour gagner du temps. Quelques Hovas, cachés dans un taillis, tirèrent sur nous, presque à bout portant, sans cependant nous atteindre. Fort heureusement, nos armes étaient bien garnies. Quelques coups de fusil dans le taillis les firent sortir de leur cachette et courir dans la direction de Marolambo, poursuivis par nos balles. Deux d'entre eux allèrent rejoindre leurs camarades dans un monde meilleur. Cependant, pour plus de sûreté, nous reprîmes la route, et nous arrivâmes jusqu'au colonel, auquel l'ordre fut transmis.

Les habitants de Marovoay nous racontèrent que lorsque nous étions à environ mille mètres de la ville, le gouverneur hova avait été traîné par les pieds par ses propres soldats et tué ensuite à coups de pierres. On l'accusait de trahison.

Pendant l'action, les habitants s'étaient réunis dans la mosquée pour prier ; mais voyant qu'on n'incendiait pas la ville, comme ils le craignaient, ils étaient retournés chez eux. Le lendemain, les reconnaissances signalaient de nombreux cadavres dans les ravins et au bord du fleuve.

L'amiral Bienaimé regagna Majunga avec ses marins. Je me plaisais à regarder ce vieux loup de mer, futur