Page:Leon Silbermann - Souvenirs de campagne, 1910.djvu/166

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partie l'objet d'un commerce honteux. Par troupeaux, des fillettes n'ayant pas encore atteint l'âge de quinze ans, sont envoyées dans les grandes villes chinoises pour être livrées au vice. C'est la misère qui engendre cet odieux trafic, car la mère n'a pas souvent les moyens de nourrir ses enfants.

Cependant, ce peuple possède une merveilleuse aptitude aux affaires commerciales et sait également tirer parti des ressources de son sol. Sa religion est le bouddhisme ; sa langue est formée du patois méridional de la Chine et la variété en est si grande que souvent, les habitants de deux villages voisins n'arrivent pas à se comprendre.

La saleté des villes et des villages est vraiment repoussante. La plupart des habitations sont construites en torchis ; beaucoup sont simplement en nattes, qu'on remplace lorsqu'il y a nécessité absolue. Les fenêtres, minuscules, donnent sur des cours, véritables dépotoirs où toutes sortes d'ordures sont jetées et s'accumulent indéfiniment. Dans chaque logement vivent pêle-mêle avec les habitants, poules, porcs, chiens et bœufs. Ce sont des foyers de pestilence. Aussi, les épidémies de peste, de choléra et de variole y sévissent et déciment parfois la population d'une manière effrayante. Cette situation est d'autant plus déplorable que les indigènes ont une confiance illimitée dans les sorciers qui pullulent et qui leur vendent des drogues sans aucun effet. Ils professent un profond dédain pour les médecins et les remèdes européens. Ainsi, pour se guérir de la fièvre, ils croquent des scorpions vivants et ne changent pas de linge ; contre la phtisie et les maladies d'yeux, ils boivent de l'urine concentrée d'enfant : comme médicaments merveilleux, ils emploient le nerf d'antilope, de la moustache et des griffes de tigre pulvérisées, et d'autres ingrédients tout aussi saugrenus.

Le riz et les patates sont pour eux ce qu'est pour nous le pain. Parfois, ils s'alimentent aussi de volaille