Page:Leopardi - Poésies et Œuvres morales, t1, 1880, trad. Aulard.djvu/279

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corps sur ma couche, et mon cœur palpitait sans trêve.

Et quand triste, fatigué, épuisé, je fermais mes yeux au sommeil, ce sommeil, entrecoupé comme par le délire de la fièvre, me manquait bientôt.

Ô combien vive au milieu des ténèbres surgissait la douce image ! comme mes yeux fermés la contemplaient sous leurs paupières !

Ô quels suaves mouvements se répandaient et se glissaient dans mes os ! Ô comme dans mon âme mille pensées changeantes, confuses,

Se déroulaient. Tel le zéphyr parcourant le feuillage d’une antique forêt en tire un murmure long et incertain.

Et pendant que je me taisais, pendant que je n’agissais pas, que disais-tu, ô mon âme, du départ de celle qui te fit souffrir et palpiter ?

Je ne me sentis pas plutôt brûler de la flamme d’amour, que le vent léger, qui nourrissait cette flamme, s’en alla.

J’étais couché au point du jour, sans penser à rien, et les chevaux qui devaient me rendre solitaire piaffaient sous le logis paternel.

Timide, tranquille et sans expérience, dans l’obscurité je tendais vers le balcon mon oreille avide et mes yeux vainement ouverts,

Pour saisir un mot, s’il devait en sortir de ses lèvres un qui fût le dernier : un mot ! car, hélas ! le ciel m’enlevait tout le reste.