Page:Lepelletier - Émile Zola, 1908.djvu/177

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

réclamant, dans son incompétence stratégique, la sortie torrentielle, et revivant l’existence révolutionnaire d’autrefois, avec une énergie plus bavarde et moins impitoyable toutefois ; Paris en révolution, sans tribunal révolutionnaire, et Paris vaincu, miséricordieux aux généraux incapables. Le départ de Zola pour Marseille nous a privés d’un livre exceptionnel, que seul peut-être il était capable d’écrire, et qui, aussi passionnant que la Débâcle, eût certainement égalé Germinal et dépassé Travail. Sa jeune femme était souffrante. Le climat du Midi la sauverait, dit le médecin, prescrivant le départ immédiat. Il se résigna donc à emmener sa mère et Mme Zola. Ces deux femmes, qui constituaient des bouches inutiles, en même temps que des personnes déjà affaiblies, l’une par la maladie et l’autre par l’âge, n’étaient pas en état de supporter les alarmes, les privations et les souffrances d’un siège. Leur exode était donc légitime et urgent. Zola conduisit ces deux êtres chers à Marseille, où il arriva au commencement de septembre. Son intention, ayant installé les deux femmes chez des amis, dans la banlieue marseillaise, était de retourner à Paris, afin de participer à la résistance. Mais l’invasion avait précipité les événements et Paris était investi. Zola se trouvait interné dans Marseille, par la force des catastrophes. Il fallait vivre, cependant. L’époque n’était guère propice aux besognes de plume. Un romancier, c’était alors une non-valeur, et tout roman paraissait fade, en présence des dramatiques événements dont la France et le monde, avec passion, suivaient les épisodes quotidiens. Quel feuilleton aurait pu lutter d’intérêt et rivaliser de péripéties aventureuses, de psychologie ardente, et douloureuse aussi, avec la réalité !