Page:Lepelletier - Émile Zola, 1908.djvu/178

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Dans une fébrile angoisse, on attendait la suite, et peut-être la fin, du siège et des souffrances de la guerre, au prochain numéro de chaque journal, au prochain lever de soleil. Les journaux, imprimés à la diable, sur des papiers de tous les formats, jaunis, pisseux, pâteux, constituaient la seule littérature possible. Le public se montrait impatient de nouvelles, de suppositions aussi. Il accueillait tous les récits, plus ou moins vraisemblables, sans se préoccuper de les vérifier. Zola songea donc aussitôt à la ressource du journalisme. C’était un des rares métiers ne chômant pas, que celui de correspondant de journaux. Beaucoup de journalistes étaient aux camps ou fonctionnaires. On pouvait espérer les remplacer. Il écrivit, le 19 septembre 1870 (les portes de Paris avaient été fermées le 17, au soir), à son ami Marius Roux à Aix : Veux-tu que nous fassions un petit journal, à Marseille, pendant notre villégiature forcée ? Cela occupera utilement notre temps. Sans toi, je n’ose tenter l’aventure. Avec toi, je crois le succès possible. Donne-moi une réponse immédiate. Tu ferais même bien, si ma proposition te souriait, de venir demain à Marseille, avec Arnaud. L’affaire doit être enlevée. Le projet se réalisa, et le journal parut, grâce à l’appui de M. Arnaud, directeur du Messager de Provence. Ce fut une feuille à un sou, ayant ce titre sonore : la Marseillaise, que Rochefort avait popularisé. Le « canard », car cette feuille, avait pour toute rédaction Zola et Roux, était insuffisante à tous les points de vue, dénuée d’argent, de publicité, d’abord, et aussi d’informations sérieuses et fraîches du théâtre de la guerre. La Marseillaise ne pouvait avoir la prétention de lutter avec les journaux importants du Midi. Elle dura seulement quelques