Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 3.djvu/153

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pressa la Commission provisoire de s’occuper de ces abandonnés.

Il lança à ce sujet une belle proclamation, qui établissait les responsabilités, et, ce qui était plus urgent et plus pratique, il y annonçait à ces malheureux qu’on allait enfin s’occuper d’eux, sans attendre la réouverture des bureaux de l’Intendance. « Il semble, disait cette proclamation, qu’on ait voulu vous provoquer à troubler l’ordre que nous nous efforçons de maintenir. » Des désordres graves étaient à craindre de la part d’une troupe disloquée, vagabondant dans la ville, en quête de pain et d’asile. Voulait-on irriter ces hommes contre le nouveau pouvoir, en lui faisant croire qu’il pouvait les soulager. La proclamation les félicitait de leur calme et de leur patience. Elle ajoutait :

En l’absence de vos officiers d’administration, nous avons tenté l’impossible plutôt que de vous abandonner. Vous vous souviendrez, quand il le faudra, que nous sommes restés à un poste qui n’était pas le nôtre, et que nous avons accepté au delà de nos devoirs de citoyens envers vous. Vous comparerez la loyauté des républicains à l’égoïsme de tous les autres partis politiques, qui prétendent se servir de vous connue d’un instrument de destruction aveugle et passif. Vous vous souviendrez, quand il le faudra, de la main fraternelle que nous vous avons tendue.

Le Président : Gaston Crémieux.

Tout cela était fort anodin. Gaston Crémieux, s’il eût été le chef révolutionnaire qu’on a voulu voir en lui, mais il était avant tout un avocat disert et non un homme d’action, n’eût pas manqué d’embrigader ces soldats abandonnés, ces hardis garibaldiens sans subsistance et sans solde, et de les diriger contre les forces, d’ailleurs insuffisantes alors, dont disposait Espivent de la Villeboisnet. Celui-ci, imitant M. Thiers, avait évacué Marseille avec ses troupes, et s’était retiré à Aubagne, dans la banlieue.