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Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 3.djvu/160

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Il y eut sans doute, malgré le courage et l’élan de nombreux citoyens avancés des grandes villes, des fautes, des négligences, auxquelles on peut attribuer en parti l’échec de la Commune dans les départements. Mais ces fautes et ces négligences n’eussent-elles pas existé, que la Commune n’aurait pas pu s’établir, même dans les centres réputés révolutionnaires. Les éléments solides faisaient défaut ; le soulèvement n’y fut que factice et restreint. À Paris, l’étendue de la ville, la pénétration réciproque des divers quartiers, le mélange des classes, devenu presque une fusion par suite des conditions de la vie, durant le long siège, et, par-dessus tout, la passion patriotique, avaient rendu facile une concentration des esprits et des volontés :

Au matin du Dix-Huit mars, l’opinion de Paris était presque tout entière hostile à cette Assemblée, qui avait fait la paix en permettant le démembrement de la patrie, et qui cherchait à se perpétuer en préparant une restauration. La révolte contre son pouvoir tout près d’être usurpateur avait perdu l’apparence révolutionnaire des émeutes ordinaires. La révolte était, dans l’esprit de la majorité, le soulèvement de la conscience publique, la protestation du patriotisme refoulé, l’indignation contre la capitulation, avec la manifestation de l’irritation causée par les souffrances passées, par celles que faisaient prévoir pour l’avenir les lois inexorables des échéances et des loyers. À ces ferments de résistance s’ajoutait l’incertitude de l’existence pour la population ouvrière et commerçante, sans travail, et brusquement privée de la solde de la garde nationale. Tous ces griefs faisaient oublier aux parisiens de la classe moyenne, et à beaucoup d’ouvriers aussi, les préoccupations socialistes et les aspirations internationales d’un petit nombre de révolutionnaires militants, agitateurs des clubs, pendant les dernières années de lutte contre le régime impérial, durant