Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 3.djvu/295

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tués, parce que ces canailles de Parisiens avaient été refoulés jusque sous leurs murs, et qu’on en avait supprimé ou empoigné un certain nombre, pas assez assurément. M. Thiers, tout en se montrant satisfait du premier résultat obtenu, se souvenait en bon latiniste de la parole du consul romain rapportée par Salluste, qui estimait que, dans une guerre civile, rien ne devait être réputé fait, s’il restait quelque chose à accomplir : nihil factum si quid superesset agendum. Il se disait, non sans une certaine inquiétude, dissimulée avec soin, que de nombreux combats et plusieurs succès comme ceux de la veille seraient nécessaires, pour qu’on pût approcher de l’enceinte parisienne. Elle était solidement armée et défendue, et il faudrait du temps, des hommes et de la patience pour en finir avec cette formidable insurrection. Un second siège allait commencer. Les forts tenaient toujours, tiendraient peut-être longtemps. Le vent, dans l’après-midi du 4, apportait par bouffées, jusqu’au local de l’Assemblée enfin rassurée, le fracas étouffé de la canonnade, et des estafettes annonçaient que, du côté d’Asnières et d’Issy, la fusillade n’avait pas cessé. Aussi, télégraphiant aux départements les bonnes nouvelles, le gouvernement, en relatant fièrement les avantages militaires obtenus, s’était-il borné à affirmer que « tout faisait espérer une prochaine et heureuse solution ». Le gouvernement n’avait plus peur d’être enlevé, ni d’être obligé de se réfugier dans une ville éloignée, Le Mans ou Fontainebleau, comme il en avait été question un instant. Les troupes s’étaient comportées parfaitement, et l’on n’avait plus à se défendre désormais, mais à attaquer. On avait donc lieu d’être content, mais il fallait attendre et espérer d’autres et plus décisifs motifs de se réjouir complètement.

Plus exubérante, moins raisonnée, éclatait la joie parmi la population surexcitée, poltronne et haineuse, qui com-