Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 3.djvu/340

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ble de Pierre Leroux lui vint de sa liaison avec George Sand. Il eut une influence plutôt fâcheuse sur ce bas bleu émérite. C’est de cette cohabitation avec le philosophe, élève de Saint-Simon le prophète, encore plus que de la tradition de J.-J. Rousseau et de Sénancour, que datent ses romans socialo-sentimentaux, les moins heureux de son œuvre emphathique, comme le Compagnon du Tour de France. P. Leroux inventa un système cosmogonique, la Triade, et produisit une théorie de l’évolution biologique, le Circulus, qui le firent surtout connaître par les sarcasmes qu’ils suggérèrent. À la Révolution de 1848, on vint le chercher dars son calme et champêtre asile de Boussac, dans le Cher, pour l’envoyer à la Constituante. Il y prononça, le 15 juin 1848, un discours qui produisit une sensation profonde, dans lequel il prophétisait le soulèvement qui, quelques jours après, se produisit. Il conseillait de coloniser l’Algérie, en y envoyant les ouvriers sans travail, Ses collègues retinrent l’avertissement, mais appliquèrent différemment le conseil : ils fermèrent les ateliers nationaux, et s’ils expédièrent des ouvriers à Lambessa et sur d’autres points du territoire algérien, ce fut, à titre de transportés, les échappés à la fusillade des rues de Paris. L’Algérie reçut ainsi des prisonniers politiques et non des colons. Pierre Leroux est mort quelques jours avant de voir recommencer, mais en Calédonie, ce genre de colonisation.

Proscrit en 1851, Pierre Leroux écrivit à Jersey son plus lisible ouvrage, la Grève de Samares, et traduisit le Livre de Job. Il a fait de nombreuses conférences en Suisse. Au cours de l’une d’elles, il a résumé ainsi son œuvre et sa vie : « On a combattu le despotisme : j’y étais ! On a renversé la royauté, j’y étais ! On a tourné l’attention vers l’idéal du progrès, j’y étais ! On a républicanisé les esprits, j’y étais ! On a fait le socialisme,