Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 3.djvu/354

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

-Mahon, qui vint aussitôt. M. Thiers lui offrit le commandement. Le maréchal refusa d’abord, protestant qu’il ne voulait pas froisser le général Vinoy. M. Thiers insista. Il s’agissait seulement de trouver une compensation pour Vinoy. Alors fut imaginée la création d’une division de réserve, indépendante du commandement en chef, ce qui ôtait à Vinoy le désappointement d’être placé en sous-ordre. Les choses ainsi aplanies, le maréchal Mac-Mahon fut nommé commandant en chef de l’armée de Versailles et présenté en cette qualité aux troupes, qui lui firent bon accueil. Comme sa blessure au derrière le gênait un peu pour monter à cheval, on fit venir à son intention un poney excessivement doux, sur lequel il s’installa sans trop de gêne, et il passa ainsi ses troupes en revue, dans l’allée de Trianon.

Le choix de M. Thiers avait été guidé par deux motifs : d’abord le caractère du maréchal : il savait qu’avec lui il n’aurait pas à craindre ; d’être gêné ou primé dans ses combinaisons stratégiques. Il connaissait, au point de vue militaire, le défaut d’initiative, la crainte des responsabilités de son prudent général, qui avait profité d’une blessure fort insignifiante pour passer à un autre le commandement, lorsque tout lui parut perdu à Sedan. M. Thiers était heureux d’avoir sous lui, tenant de lui le commandement, un chef longtemps renommé, qui avait servi l’empire sans être impérialiste, et qui était considéré par tous les partis de réaction comme le représentant le plus autorisé des forces, non pas dynastiques, mais conservatrices. Évidemment cette nomination serait agréable à l’Assemblée nationale. Le maréchal lui parut donc d’un heureux choix, pour sa tranquillité, pour le maintien de son autorité, et aussi le meilleur garant qu’il pût avoir auprès de l’impatiente et ingouvernable droite.

M. Thiers ne voyait pas alors plus loin, malgré toute sa