Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 3.djvu/360

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Au moment dont je viens de parler, a-t-il dit, faisant allusion à la première semaine qui suivit sa fuite à Versailles, nous ne comptions que 22,690 hommes. Je fis occuper le Mont-Valérien… Quant aux autres forts, nous nous serions affaiblis, si nous avions voulu les garder, car il nous aurait fallu au moins 8,000 hommes pour les occuper. Nous aurions perdu là une partie notable de nos forces. Je ne gardai donc que le Mont-Valérien, et je ramenai tout le reste : j’eus ainsi 22.000 hommes bien liés et bien commandés. Nous passâmes quinze jours à Versailles sans rien faire. Ce sont les plus mauvais jours de ma vie. Il y avait cette opinion répandue dans Paris : Versailles est fini ; dès que nous nous présenterons, les soldats lèveront la crosse en l’air. J’étais bien certain que non, et cependant si nous avions été attaqués par 70, ou ; 80,000 hommes, je n’aurais pas voulu répondre de la solidité de l’armée, ébranlée surtout par le sentiment d’une trop grande infériorité numérique…

(Déposition de M. Thiers. — Enquête Parlementaire, t. II, p. 14.)

Avant de suivre dans l’intéressante déclaration de M. Thiers l’exposé de la formation et de l’augmentation progressive de l’armée destinée à triompher de la Commune, insistons sur les points suivants, déjà indiqués dans les deux précédents volumes de cette Histoire :

1o  — Le gouvernement et l’Assemblée n’avaient, pour les défendre, dans la semaine qui suivit leur fuite, que des troupes peu solides et surtout insuffisantes. S’il y avait eu alors contact et combat, l’armée de Paris se trouvait dans la proportion de 20 contre un : 200,000 parisiens ardents contre 20,000 soldats en déroute.

2o  — Si, dès le 20 mars, Versailles eût été attaqué par cette force supérieure, M. Thiers reconnaît, et l’aveu dut lui coûter, « qu’il n’eût pas répondu de la solidité de l’armée », c’est-à-dire que la débandade du 18 mars sur la Butte Montmartre se continuait sur la butte de Picardie et sur les avenues de Versailles.

3o  — La faute impardonable du Comité Central de n’avoir