Page:Lepelletier - Paul Verlaine, 1907.djvu/150

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fut la conséquence de l’étourdissante renommée qui suivit la représentation du Passant. Le bruit fait autour de ce petit acte poétique fut le son de caisse qui attire la foule. Tous les amis de Coppée, tous ces jeunes poètes qui déjà formaient phalange, et faisaient parler d’eux, bénéficièrent de la rumeur grandissante. Le public avait les yeux sur eux. Ils existaient. Il y avait trente ans et plus qu’on n’avait vu le public se préoccuper de faiseurs de vers et s’intéresser à un renouveau poétique.

Les Poèmes Saturniens parurent dans l’édition originale en un volume in-18, de 163 pages, portant l’adresse d’Alphonse Lemerre, éditeur à Paris, 47, passage Choiseul, avec le millésime M. DCCC. LXVI et la vignette, alors sans soleil levant, du laboureur bêchant, et la devise : Fac et spera.

Verlaine, de camarades et de poètes notoires, auxquels il envoya son volume, reçut des éloges flatteurs.

Leconte de Lisle déclarait que « ces poèmes étaient d’un vrai poète, d’un artiste déjà très habile et bientôt maître de l’expression ».

Théodore de Banville, avec un peu d’affectation, affirmait que, bien que souffrant et littéralement brisé, il avait lu et relu dix fois de suite les Poèmes Saturniens. Il se déclarait empoigné, et comme public et comme artiste. Il affirmait que Verlaine était un poète d’une originalité réelle. « Nous sommes tous assez blasés sur toutes les jongleries possibles pour ne pouvoir être pris que par la poésie vivante. » Le poète des Cariatides citait élogieusement, et particulièrement, trois pièces délicates, qui, d’ailleurs, se rapprochaient assez de sa manière, comme la Chanson des Ingénues, et il terminait par cette opinion que l’avenir a confirmée, que la postérité ratifiera : « Je suis sûr de ne point me tromper