Page:Lepelletier - Paul Verlaine, 1907.djvu/235

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« d’espérer ». M. Mauté ne comptait guère. Sa femme et sa fille approuvaient en principe, c’était l’important. Il y avait donc lieu de croire que tout se terminerait pour le mieux. Mais Paul devait comprendre qu’on ne pouvait lui donner une réponse immédiate. Il était plus que probable qu’il n’avait pas à craindre un refus.

Sivry l’engageait donc à rester encore quelques jours à la campagne. Il lui promettait de venir le rejoindre sous peu, pour l’emmener à Paris. Là, on verrait. Les choses vraisemblablement s’arrangeraient au mieux.

Disons, pour expliquer, comme nous l’avons fait pour la jeune fille, la promptitude avec laquelle la famille Mauté agréait le projet de mariage, que les Mauté avaient deux filles, que leur fortune n’était pas considérable, et que Verlaine, physique à part, n’était pas un parti à dédaigner. Il n’était pas le poète famélique des légendes de la bohème. Employé à la préfecture de la Seine, il avait une situation sérieuse, fixe, solide, très appréciée dans le monde bourgeois. C’était sûr, un emploi pareil. Il était bachelier, et, par conséquent, il pouvait espérer, à la suite d’examens, arriver à des emplois supérieurs. De plus, fils unique, il devait avoir une dizaine de bonnes mille livres de rente à recueillir du côté de sa mère, sans parler d’autres parents, cousins et cousines, dont il était l’héritier éventuel. Enfin, dès les premiers mots à Sivry, il avait écrit qu’il aimait Mathilde, et qu’il la prendrait pour elle-même. Le fameux : Sans dot ! est encore le meilleur « Sésame, ouvre-toi » des mariages bourgeois.

Voilà Verlaine ravi. Il lit et relit la réponse réconfortante. Son imagination devance les événements : il se voit déjà agréé, espéré, reçu, aimé, fiancé admis à faire sa cour. Il jouit par avance de ces travaux d’appro-