Page:Lepelletier - Paul Verlaine, 1907.djvu/291

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M. Istace, vieux plaideur endurci, lui avait indiqué cet avoué, et s’était chargé de suivre les phases du procès. Ce fut pour échapper à tous ces ennuis, pour changer d’air, que Verlaine résolut de s’expatrier, au moins provisoirement.

Il s’isolait depuis quelque temps déjà, ayant rompu avec bien des camarades ; il avait cessé ses fréquentations chez Lemerre. Celui-ci a dit « qu’à cette époque, — 1872, — le poète était devenu nerveux, atrabilaire, quinteux ». Il ne faut cependant pas croire, ce qui d’ailleurs eût été démenti par toutes les lettres, par toutes les appréciations de Verlaine, que le succès de ses amis lui eût porté ombrage. Verlaine ne fut jamais jaloux de personne, ni de Coppée, ni d’aucun autre des Parnassiens arrivés. L’envie lui était un sentiment tout à fait étranger Il était plutôt porté à se réjouir, comme d’un succès personnel, de la notoriété acquise par les Parnassiens, et volontiers il y coopérait par ses applaudissements. Il ne manquait jamais, chaque fois qu’un de nos camarades publiait un livre ou avait une pièce représentée, de manifester son intérêt ou sa satisfaction, même dans les moments les plus troublés et les plus accidentés de son existence, à l’étranger.

Lemerre ajoute d’ailleurs, dans cette note que reproduit M. Ch. Donos : « Il avait été des premiers à me prédire le grand succès de Coppée, mais l’alcool le rendait sujet à des colères terribles, et il fallut renoncer avec lui à toute réunion ; il se sentait observé, importun, il ne vint plus. »

J’avais répondu à la lettre de Verlaine qu’on vient de lire, en lui donnant le conseil de résister à la demande en séparation de corps intentée par sa femme. Je l’engageai à ne pas se laisser condamner par défaut, ce qui