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ENFANCE

Un maître seul faisait exception à l’apathie hautaine de ces cuistres éminents : c’était le bon, le doux, et quelque peu grotesque professeur d’anglais, M. Spiers. Par une originalité, qui le faisait tourner en dérision dans le Lycée, même par ses collègues, M. Spiers voulait diriger et suivre ses élèves, tous ses élèves. Il les interrogeait, il corrigeait leurs devoirs.

Je sais gré à l’excellent homme de sa méticuleuse surveillance ; elle me permit de soigner davantage mes devoirs, de faire plus attention aux leçons, et, par la suite, de continuer l’étude de l’anglais. Il est impossible d’apprendre une langue vivante au lycée, mais on peut y acquérir les premières notions d’un idiome étranger, avec le goût, le désir de le posséder plus complètement.

Verlaine, comme moi, subit l’influence du bon M. Spiers. Il acquit des éléments d’anglais suffisants pour pouvoir, par la suite, en Angleterre, où l’avaient jeté les événements, se débrouiller, et même arriver à une certaine connaissance de la langue anglaise. Quand, homme fait, il se mettait à l’étudier avec ardeur, durant son séjour à Londres, il regretta, plus d’une fois, de n’avoir pas mieux suivi jadis les leçons de l’excellent M. Spiers, à qui justice, pour la première fois, sans doute, est ici rendue. Le bon maître est, d’ailleurs, mort et enterré depuis longtemps, et cet éloge est seulement un hommage à la vérité.

Ceci démontre que l’éducation donnée à un trop grand nombre d’élèves, rassemblés, par un professeur uniquement attentif à ceux de ses auditeurs qui lui paraissent susceptibles de profiter immédiatement de l’enseignement, de le faire valoir au dehors, d’attirer les éloges officiels, et de récolter couronnes, mentions et diplômes, a empêché