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PAUL VERLAINE

bien des jeunes gens de tirer un fruit quelconque de leur séjour au lycée.

Si chacun de nos professeurs s’était occupé de ses élèves comme le maître d’anglais, nous eussions été d’aussi bons écoliers que d’autres, et nous n’aurions pas eu tant de peine, par la suite, à conquérir nos diplômes, et à réapprendre nous-mêmes le latin, le grec, et bien d’autres choses encore, d’ailleurs généralement inutiles pour la réussite dans la vie, comme pour le bonheur.

Le bon M. Spiers, malgré son zèle et le soin qu’il apportait à verser son enseignement dans les petits vases cérébraux inclinés devant lui, sur les gradins de la classe d’anglais, était souvent obligé de fermer les oreilles, pour ne pas entendre certains frôlements de pieds, certains bruissements et bourdonnements, transformant la classe en ruche, dont les abeilles étaient des frelons. M. Spiers, à la perception du frôlement pédestre ou du susurrement labial, distribuait, à droite, à gauche, les verbes irréguliers à copier. Parfois, entendant bavarder, il s’arrêtait, au milieu de sa leçon, et s’écriait, avec une solennité comique, « qu’il considérait toute conversation entre élèves comme une demande « tacite » de passer à la porte » !

En rhétorique, l’année suivante, nous eûmes, comme professeur de latin, un universitaire de la vieille couche. M. Durand, ancien pédagogue insignifiant, savant en « us », qui nous négligeait comme ses collègues. Le professeur d’histoire, plus intéressant, était M. Camille Rousset, l’auteur de divers travaux historiques sur Louvois, sur les Volontaires de la République, sur la Conquête de l’Algérie, devenu académicien par la suite. Enfin, notre maître de littérature se nommait M. Deltour. Il a laissé un nom dans l’enseignement. Jeune