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PAUL VERLAINE

chiffrable, que Verlaine ne conserva même pas, car lorsqu’il pensa, par la suite, à faire entrer ce poème dans le premier volume qu’il publiait, il me redemanda son Nocturne. Il me l’avait passé, au cours de la classe, dissimulé dans un volume quelconque, tandis que le professeur de rhétorique latine, le bon M. Durand, nous initiait, d’une voix molle et sans conviction, aux beautés de l’Électre de Sophocle.

Jules de Goncourt, à propos de ce poème de début, écrivit à Verlaine, en le remerciant de l’envoi des Poèmes Saturniens :


… Vous avez ce vrai don : la rareté de l’idée et la ligne exquise des mots. Votre pièce sur la Seine est un beau poème sinistre mêlant comme une Morgue à Notre-Dame. Vous sentez et vous souffrez Paris et votre temps…


Verlaine, parlant de ses premiers essais anéantis, et qu’il qualifie de détestables, énonce : l’ébauche d’un drame sur Charles VI, dont le premier acte, celui du bal masqué où le roi brûle à demi et commence à devenir maniaque, s’ornait d’une ronde orgiaque qui débutait ainsi :


Que l’on boive et que l’on danse,
Et que Monseigneur Jésus
Avecque les saints balance
La chaîne des pendus !


La forêt légendaire où le monarque fut assailli par une sorte de sauvage, braconnier à demi-fou, dont l’apparition provoque la démence royale, et des épisodes de la guerre de Cent ans, devaient constituer les principales péripéties de la pièce. Il cite aussi son projet de drame avec Charles V, Étienne Marcel et le roi Jean pour personnages. Enfin il rêva d’un Louis XV en six actes,