Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/13

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femme lui appliqua sur la joue un léger soufflet. — Oui, ma cousine Antoinette, cette chère enfant que j’avais si souvent inutilement demandée à son père depuis six mois, a enfin obtenu la permission de venir jouir un peu, sous mes auspices, de la vie du monde.

— Veux-tu parler de cette petite fille rose et naïve que j’ai vue, il y a deux ans, à la campagne, chez M. de Mirecourt ?

— Précisément mais au lieu d’une petite fille, c’est aujourd’hui une jeune demoiselle, et ce qui ne lui nuit pas le moins du monde, une riche héritière. Mon oncle de Mirecourt a consenti à la hisser venir passer l’hiver avec nous, et j’ai résolu qu’elle verrait un peu de société pendant ce temps là.

— Ah ! je ne sais que trop bien ce que cela veut dire. À partir de ce moment nos règlements d’intérieur vont être foulés aux pieds, la maison bouleversée et constamment assiégée par ces jeunes fats aux sabres traînants, par ces militaires anglais dont tu as pris un soin tout particulier de me parler depuis quelque temps. Hélas ! j’avais pourtant espéré que le départ du chevalier de Lévis et de ses braves compagnons mettrait à la retraite ce zèle, cette fièvre militaire ; je dois l’avouer, à ma honte, si quelque chose eût pu me consoler pendant ce sombre épisode de l’histoire de mon pays, c’eût été la réalisation de cette espérance.

— Que veux-tu, cher ami, répondit Madame