Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/12

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Enfin lorsque, non satisfaits de ces réponses, ses amis insistaient davantage, il les renvoyait à Madame d’Aulnay, et, comme on savait que cette jolie Dame avait, en plus d’une occasion, manifesté la ferme détermination de ne jamais aller s’enterrer, vivante, au fond d’une campagne, — quoique cependant elle n’eût aucune objection d’y être enterrée après sa mort, — on avait fini par laisser M. d’Aulnay en paix.

Comme nous l’avons dit, le maître de la maison était tranquillement assis dans sa bibliothèque ; aucun souci politique ne troublait pour le moment ses plaisirs intellectuels et il était entièrement absorbé par la lecture d’un ouvrage scientifique, lorsque tout à coup la porte s’ouvrit et donna passage à une élégante femme vêtue avec un goût exquis et appartenant au type de ces héroïnes de Balzac qui ont dépassé la trentaine, mais qui ont encore la prétention d’être jeunes.

— Monsieur d’Aulnay ! s’écria-t-elle en posant familièrement sur l’épaule de celui-ci sa jolie petite main chargée à profusion de bagues et de diamants.

— Eh ! bien, qu’y a-t-il, Lucille ? demanda-t-il en fermant son livré d’un ton qui dénotait un certain regret, mais non pas de l’impatience.

— Je suis venue t’annoncer qu’Antoinette est arrivée.

— Antoinette ! répéta-t-il machinalement.

— Oui, cher distrait. — Et la belle main de la jeune