Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/139

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ta-t-il avec un rire forcé ! voilà, Antoinette, une question passablement singulière.

— Écoutez-moi bien, dit-elle à la fois avec douceur et avec fermeté, — et cette fois aucun tremblement ne se fit sentir dans sa voix, aucun mouvement nerveux ne se manifesta dans ses manières. — Je vous répète ce que je vous ai déjà dit, que jusqu’à ce que notre mariage soit avoué devant le monde, je ne serai pour vous rien autre chose qu’Antoinette de Mirecourt.

— Tu es méchante et cruelle de me traiter ainsi ! répéta-t-il avec aigreur.

— Pas du tout, major Sternfield ! s’écria madame d’Aulnay en s’avançant vers eux. Antoinette a parfaitement raison, et si je vois que d’ici à l’époque qu’elle vient de mentionner vous agissez de façon à l’incommoder ou à l’attrister, soyez bien convaincu que, malgré l’estime que je vous porte, malgré ce que j’ai fait et ce que je ferais encore pour vous, je serai obligée de me priver du plaisir de vous voir dans ma maison. Rappelez-vous qu’Antoinette est sous ma protection et que je dois la garantir contre les chagrins inutiles et les contrariétés qu’on voudrait mettre sur sa route.

— Juste ciel ! interrompit impétueusement Sternfield, est-ce ainsi que vous me menacez, que vous me parlez à propos de ma propre femme ? Cela dépasse la patience humaine ! cela dépasse la pensée !… Non, je dois parler et je parlerai, continua-t-il avec plus de violence encore en repoussant la main que madame