Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/42

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en jetant un coup d’œil dans la direction où se trouvait Lucille avec son impassible partenaire.

— C’est le colonel Evelyn.

En prononçant ce nom, une expression d’aversion mêlée d’impatience traversa la figure du militaire, mais il la réprima presqu’aussitôt et ajouta sur un ton plus bas :

— C’est la seule exception à laquelle j’ai fait allusion tout à l’heure, le seul de mes amis qui ne s’est pas promis de faire votre connaissance ce soir. N’est-ce pas assez, ou voulez-vous en savoir davantage sur son compte ?

— Certainement : il m’intéresse maintenant plus que jamais.

— C’est bien là une perfide réponse de femme ! pensa en lui-même Sternfield qui reprit en inclinant légèrement la tête : Eh ! bien, yos désirs seront satisfaits. Je vous dirai en peu de mots, mais strictement confidentiels, ce qu’est le colonel Evelyn. Il compte parmi ceux qui ne croient ni en Dieu, ni en l’homme, pas même en la femme.

— Vous m’effrayez ! Mais, c’est donc un athée ?

— Non pas peut-être en théorie, mais en pratique il l’est certainement. Né et élevé dans les principes du catholicisme, jamais, de mémoire du plus ancien du régiment, il n’est entré dans une église ou une chapelle. De manières froides et réservées, il n’est avec personne sur un pied d’intime amitié. Mais ce