Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/78

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le pénible devoir de les débarrasser de leurs douleurs. Je n’ai pas été assez courageux pour assister à l’accomplissement du sacrifice.

Après un moment de silence, Antoinette reprit d’une voix agitée :

— Je ne puis vous exprimer comme il faut, colonel Evelyn, le chagrin que j’éprouve pour vous aussi bien que pour la part directe que j’ai eue dans ce malheureux événement, ni vous dire combien je suis peinée de voir que mon souvenir sera attaché, dans votre mémoire, à une des circonstances les plus désagréables qui auront probablement marqué vote séjour au Canada.

— Ne dites pas cela, mademoiselle de Mirecourt, s’empressa-t-il de répondre. Félicitez-moi plutôt de la bonne fortune qui a voulu que vous fussiez avec moi au lieu de madame d’Aulnay ou de quelqu’autre femme timide dont les craintes, traduites par des cris et des exclamations, auraient infailliblement entraîné la perte de deux vies autrement précieuses que celles d’une couple de chevaux. Je vous le répète : peu de femmes auraient pu déployer ce sang froid, cette possession d’elle-mêmes que vous avez montrés aujourd’hui et qui ont plus fait pour notre salut à tous les deux que mon habilité en équitation… Mais voici venir notre humble ami avec les débris de notre équipage.

Antoinette s’approcha de la fenêtre, et vit leur hôte et une couple d’autre habitants qu’il avait amenés avec lui pour l’aider, s’approcher, portant un devant