Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/132

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avait adressé des paroles aussi sévères que celles dont il venait de l’accabler. Se méprenant sur les craintes secrètes et l’anxiété qui la torturaient, il attribua son émotion à la sévérité dont il venait de faire preuve à son égard.

— Prenez ce siège, Antoinette, continua Louis en lisant sur la figure de son père les sentiments qui s’agitaient en lui ; asseyez-vous : je sais que M. de Mirecourt va vous accorder six mois, au lieu d’un, pour vous permettre de réfléchir et pour préparer votre trousseau.

— Tu es un amoureux bien philosophe, Louis ! s’écria M. de Mirecourt avec sarcasme, plus philosophe que je ne l’aurais été à ton âge : vraiment, tu ne parais pas pressé de conquérir ton bonheur.

— Parce que je désire celui d’Antoinette avant le mien, répondit-il pendant que l’expression de sa figure s’assombrissait passablement. Mais dites, M. de Mirecourt, n’est-il pas vrai que vous lui accordez six mois de plus ? Espérons qu’après ce temps vos vœux et les miens seront comblés.

Pauvre Louis ! il connaissait bien la futilité de cette illusion ; mais, dans sa généreuse abnégation, il ne songeait qu’à obtenir du répit en faveur de la pauvre jeune fille tremblante qui était devant lui.

— Qu’il en soit comme tu le désires ! répondit M. de Mirecourt en essayant de paraître indifférent. Puisque le futur se déclare satisfait, je dois l’être également. Mais rappelle-toi, Antoinette, ce que je t’ai déclaré tout à l’heure au sujet des amoureux ou des