— Enverrai-je Fanchette, ma tante ?
— Non, chère, elle se dit malade ce matin. Voyons, qui enverrons-nous ? Elles ont toutes eu une dispute, sur un sujet ou sur un autre, avec cette insupportable madame Lauzon.
Elle s’arrêta un instant et jeta sur ses compagnons un regard interrogateur, comme pour leur demander leur avis, quand le jeune de Montarville lui dit :
— Si vous me le permettez, madame Dumont, je serai très heureux de porter votre message.
Une rougeur très légère passa sur la joue de Blanche, à cette proposition, mais elle ne fit aucune remarque, et comme madame Dumont répondait sans aucun soupçon : Merci, cher Gustave, vous êtes toujours complaisant, toujours prêt à obliger, elle quitta tranquillement la chambre.
De Montarville, sans être tout à fait à l’aise avec sa conscience pour s’être ainsi exposé à la tentation, partit pour remplir sa mission ; mais tous les reproches qu’il put s’adresser à lui-même, furent bientôt oubliés dans l’anticipation du plaisir de rencontrer encore une fois la jeune fille qui, sans qu’il se le fût encore avoué à lui-même, occupait déjà une si grande part de ses pensées. Un seul mot lui suffit pour lui indiquer le lieu de la résidence de Rose, car il se souvenait encore de l’avoir vue auparavant dans le voisinage de sa maison, un jour qu’il était allé faire une promenade à cheval.
Il avait refusé la voiture de madame Dumont, et, sur la route, il se demandait à lui-même dans quelle humeur il trouverait la gentille belle du village. Montrerait-elle à sa vue de la joie, de l’embarras, ou du déplaisir ? Il lui était impossible de le deviner. Mais il était également bien préparé à la rencontre de ces trois différents sentiments ; pourtant, comme nous allons le voir bientôt, il ne l’était nullement aux circonstances dans lesquelles il devait la trouver.
Il frappa à la porte de la maison de Lauzon, mais ne recevant aucune réponse, il suivit la coutume universellement établie dans la campagne, et entra sans plus de cérémonie. Le premier appartement était vide ; mais il s’aperçut immédiatement que le second ne l’était pas, car son oreille fut pé-