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L’ONCLE

de leurs filles, que je mettrai auprès d’elles une institutrice de confiance qui sera chargée spécialement de les surveiller. C’est une demoiselle fort estimable que l’on m’a beaucoup recommandée. Elle a déjà fait l’éducation de plusieurs jeunes filles et mes nièces ne risqueront absolument rien avec elle. Il va sans dire que tous les frais de voyage sont à ma charge.

Le notaire s’inclina gravement.

— Mettons que le fait soit sans précédent, ajouta son interlocuteur, il s’agit peut-être ici de l’avenir de ces fillettes, leurs parents ne feraient pas la folie de s’y refuser, sous prétexte que ce n’est pas selon les usages. Vous voyez tous les jours des grands-pères inviter leurs petits-enfants.

— Certainement, murmura Maître Chatelart, ne sachant comment faire comprendre à son singulier client que le mystère qui planait sur sa vie pourrait bien effrayer les mamans des fillettes.

« Somme toute, » se dit-il après réflexion, « ce mystère n’existe peut-être que dans notre imagination. Les gens qui arrivent des colonies ont tous un coup de soleil. » Et il sourit de son mot, qui lui parut très drôle : « Ils ont toujours l’air de faire des extravagances… Bah !… Du moment où une institutrice est là pour veiller sur les petites filles, que peut-il leur arriver de fâcheux ? »

Comme s’il eût deviné les pensées du vieux monsieur, M. Maranday lui tendit une liasse de papiers :

— Je tiens à votre disposition des certificats exceptionnels que l’on m’a fournis sur Mlle Favières, l’institutrice en question. Veuillez, je vous prie, les communiquer à mes cousins s’ils en manifestent le moindre désir. Ils sont tels que la mère la plus scrupuleuse n’hésiterait pas à lui confier sa fille et que le