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BALAOO

ou faire une noce « carabinée » dans la forêt. Et, tout de suite, il arriva sur les derrières de la propriété Coriolis à la petite porte qui donnait sur les bois. Avec précaution, il respira le sentier qui conduisait à la gare, mais ça ne sentait pas le voyageur. Alors, en tremblant, il tira le cordon de la sonnette. Celle-ci tintinnabula avec une telle force que Balaoo fut près de défaillir.

Au delà du mur, des pas firent craquer les feuilles mortes Balaoo se mit à genoux sur le seuil de pierre.

La porte s’ouvrit et Balaoo se sentit tout de suite pris par l’oreille.

— Vaurien ! lui dit une jeune voix féminine, irritée ; tu vas me payer ça !… Deux jours et deux nuits dehors. Et dans quel état ! Ah ! c’est du propre ! j’en pleurerais !… J’en ai pleuré, Balaoo !… J’en ai pleuré !… Ah ! ne pleure pas, toi, ne pleure pas ! tu vas ameuter tout le village ! espèce de petit voyou ! En loques ! en loques !… un pantalon tout neuf… Ton paletot de la Belle Jardinière !… Tu es allé encore dans tes arbres, dis !… Tu es allé rêver à la lune !… Papa en est malade.

Traîné par l’oreille, docile, repentant, larmoyant et le cœur sonore du remords qui le faisait battre, Balaoo se laissa conduire jusque chez lui. Mais, arrivé tout au bout du fameux potager où il était censé travailler fort mystérieusement, avec M. Coriolis, aux différentes transformations de la plante à pain, et les portes de son appartement poussées, il se trouva en face de Coriolis lui-même. Aussitôt il fit un mouvement comme pour regagner, d’un bond, la forêt propice.

La figure de Coriolis était plus froide, plus morte qu’un marbre.

Balaoo connaissait cette tête-là. Il ne redoutait rien