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BALAOO

— En effet, il me fait peur, déclara l’étranger avec un mouvement de recul.

— Encore une fois, ne craignez rien. Vous l’avez contrarié avec ce mot-là, mais il ne ferait pas de mal à une mouche !

(— Il m’embête avec sa mouche, pensa Balaoo. Qu’il aille donc demander à Lombard, le perruquier de la rue Verte, l’ami de Camus… qu’il aille donc lui demander si je ne fais pas de mal à une mouche !)

— Oh ! il comprend tout ! reprit Coriolis.

— Et vous dites qu’il parle ?

— Mieux que nos paysans ! Parle, Balaoo, dis-moi quelque chose.

Balaoo, en se voyant ainsi traité comme un curieux animal de foire devant un de la Race, tourna sa pauvre face ravagée par le désespoir et la honte du côté de celle qui avait toujours été, dans les pires épreuves, sa suprême consolation et, quelquefois dans la nuit animale où son cerveau retombait, son étoile de salut.

Madeleine, qui voit sa peine, lui sourit en prononçant cette phrase :

— Civilité, n° 10.

L’anthropopithèque se retourna aussitôt vers l’étranger :

— Je n’ai pas encore eu l’honneur de vous être présenté, monsieur, fait-il, d’une voix rugissante, dont la maison tremble.

— Oh ! s’exclama l’étranger. Oh ! Ah ! ah !…

Et il ouvre les yeux de quelqu’un qui va galoper de peur.

Mais Coriolis n’est pas content :

— Poliment ! reprend-il, poliment !… Avec ta voix la plus douce.