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BALAOO

M. Herment de Meyrentin ne peut achever ni son sourire ni sa phrase, car il a, autour de la gorge, deux tenailles qui se resserrent avec une force inquiétante pour quelqu’un de la race humaine qui aurait encore l’espérance de vivre longtemps sur la terre et d’y prononcer des paroles stupides et indécentes. Il râle ! Il se débat ! Il étouffe ! Balaoo serre, serre, serre !

Coriolis et Madeleine poussent des clameurs d’épouvante et s’accrochent, se pendent à Balaoo pour lui faire lâcher prise. Coriolis s’est armé d’un chenêt et frappe des coups qui résonnent sur Balaoo comme sur un tambour ; mais Balaoo ne sent rien ! Madeleine pleure, sanglote, supplie, délire ; mais Balaoo n’entend rien. Il serre, il serre, il serre.

Et il ne s’arrête de serrer que lorsque M. Herment de Meyrentin s’arrête de se débattre. Ça lui apprendra à ce Monsieur à trouver que Balaoo qui ne ferait pas de mal à une mouche n’est pas beau, et il ne se moquera plus de lui devant les jeunes filles à marier. Le voilà bien avancé maintenant : il est mort !

Mort ! M. le juge d’instruction Herment de Meyrentin, cousin germain de l’illustre professeur, membre de l’Institut, secrétaire de la section des Sciences morales et politiques, Herbert de Meyrentin ! Voilà une famille en deuil ! Une illustre famille ! Voilà tout ce qui reste de tant de puissance humaine, d’un juge d’instruction ! Une loque, un pantin cassé sur le bras d’un anthropopithèque ! Balaoo jette ce débris à terre. Il voit avec stupéfaction le bon Coriolis coller son oreille sur la poitrine de ça ! Il y a des gens qui ne sont pas dégoûtés ! Mais où est sa petite sœur Madeleine ? Balaoo la cherche du regard et la trouve, tout à fait appuyée à plat contre